« Mon » entreprise commanditaire Thomas & Harrison (présentée au paragraphe Chronologie en bas de page, après la présentation ds œuvres) prend contact avec moi pour la reprise du logo de la société Peugeot et me demande alors un devis pour un travail sur un château d’eau sphérique à l’usine de Poissy. Les conditions sont alors celles de l’époque de ce premier contact : travailler à 70 mètres du sol et installé sur une échelle méridienne motorisée et montée sur deux rails, haut et bas (visible sur la photo ci-dessous).
Ensuite plus de nouvelles durant … plus de dix ans !
Et puis : nouvelle direction de l’usine ? Révision de sa stratégie (j’ai même appris qu’il avait été envisagé de supprimer ce château d’eau…) ? Quoiqu’il en soit le projet a refait surface et j’étais à nouveau en première ligne ! Par contre, à ce terme de dix ans la législation du travail avait évolué, et il n’était plus question de peindre à partir de cette échelle : l’Inspecteur du Travail a demandé un échafaudage de pied (monté à partir du sol) !
Pour info, voici la vue prise du haut de la sphère (avant échafaudage) : j’aurais dû aborder cette échelle technique, armé de tout mon matériel, en partant dos au vide et « à quatre pattes » à reculons depuis cet unique accès (vue plongeante dans la coin inférieur gauche) : brrrr….!
L’échafaudage a donc été monté pour permettre un traitement de toute la surface de l’édifice :
Si j’ai été contacté pour ce travail particulier c’est en raison de mes capacités à créer une anamorphose, compétences connues de mes interlocuteurs par le fait de ma réalisation à Los Angeles en Californie : « Sitting Bull anamorphosé » (cf. fresk.eu). En effet le nouveau logo de Peugeot (ce lion dressé revu et curieusement modifié, jusqu’à susciter le surnom de « Lion en charentaises » de la part des ingénieurs directeurs des travaux dans les bureaux du site…!), ce logo devait être reproduit quatre fois et être déformé de façon à ce que la sphéricité du support n’en altère pas la lecture depuis le sol.
Alors trop peu intéressé par les calculs mathématiques relatifs à ces déformations savantes du graphisme, je me suis adressé à… l’ IGN (Institut Géographique National). Je passais régulièrement devant leurs bureaux de Vincennes, et l’idée m’est alors venue de leur proposer ce défi : « Vous avez l’expertise pour mettre à plat la sphéricité de la terre, j’imagine que l’inverse n’aura pas de secret pour vous ? » On m’a adressé au « polytechnicien-qui-a-défini-le-centre-de-gravité-de-l’Europe », ingénieur sénior très aimable qui m’a assisté jusqu’au bout du chantier (°) !…
(°) : Ce Monsieur m’a donc fourni ma maquette à plat du tracé à reproduire, sachant que je disposais de nombreux repères sur la sphère, qui en sont les cordons de soudure, méridiens et horizontales partielles sur toute sa surface. J’avais demandé (du fait que pour toute anamorphose il faut UN point de lecture optimale) de focaliser la lecture à 1,70m du sol à 250m du château d’eau, point d’entrée sur la voie d’accès au site Peugeot de Poissy. Les mises au point se sont déroulées par téléphone (mon premier téléphone portable !) : lui assis à son bureau de Vincennes et moi à 70 m du sol, à Poissy, un feutre à la main !…
Une fois parvenus au sommet (par ascenseur de chantier) notre travail a été celui de tout chantier de la même espèce mais avec des « imprévus » dus à la spécificité du support. La sphère de huit mètres de diamètre avait été entièrement poncée et peinte pour recevoir la peinture primaire, que nous allions appliquer nous-mêmes, destinée à recevoir le bleu Peugeot, préparé par la fabricant de peinture sur présentation de la référence client.
Première phase : il avait été choisi de porter en façade, avant l’ouverture des travaux, à la hauteur finale définie, un échantillon du logo pour validation du client. Cet échantillon a donc été peint en atelier…il « ne restait plus qu’» à l’accrocher à l’extérieur des garde-corps de l’échafaudage, à 70m du sol !! C’est Ati, artiste peintre mais surtout alpiniste confirmé, très bien organisé, qui s’en est chargé, :
Deuxième phase : repérage des positions des quatre logos à reporter sur la sphère : il n’est pas aisé sur une telle structure de tracer une verticale, heureusement que les cordons de soudure étaient à intervalles réguliers et assez proches les uns des autres ! Puis application des poncifs (puzzle de calques manipulables) le logo mesurant plus de 4m de haut, et donc réparti sur trois étages d’échafaudage, le puzzle comportait huit pièces à disposer bord à bord. Le report du graphisme tracé et perforé sur le calque, devait ainsi déterminer les zones à préparer (par ponçage) pour appliquer la fameuse primaire d’accroche préalable à l’application de la peinture bleue.
Les produits utilisés étant particulièrement toxiques (= garantie de durée…) nous devions être équipés au mieux pour la protection de chacun.
La petite histoire dira que nous avons eu une très mauvaise surprise, en décollant les premiers caches !
Appel affolé au service technique du fabricant : nous avions dépassé le délai permettant le recouvrement de la peinture blanche de départ ! « J’aurais dû le savoir »… il fallait mieux lire la notice technique ! Armés de ponceuses vibrantes nous avons décapé toutes les surfaces déjà peintes et… « À r’comm » ! Heureusement assez nombreux : avec Ati, Elyès, Isabelle, Yahya et parfois un ou deux autres assistants, nous avons abordé cette phase en rigolant, protégés des poussières par nos masques, et habitués au vacarme suscité par les ponçages quotidiens provenant de l’intérieur de cette énorme sphère, et réalisés par les peintres en charge de la neutralisation du support destiné à recevoir l’eau…
Nous savions prendre nos temps de pause et parfois celui de nous restaurer « au calme »…
Ce fut une expérience intéressante, vraiment hors du commun, remarquable,
et … remarquée !
Une réflexion sur “PEUGEOT : le logo à 72 mètres du sol”