Nouvion-sur-Meuse


Avril 2019 : Appel de mon ami Christian Vanelle, architecte dans les Ardennes : « La Ville de Nouvion-sur-Meuse, t’invite à la réalisation d’une peinture murale de 75 m², il faut commencer dès que tu pourras ! » J’ai ainsi commencé ma conception, dès le lendemain, d’une maquette qui doit commémorer le passé de grande gare de triage ferroviaire que fut Nouvion. Tout s’est fait au cours d’échanges par voie numérique, et téléphonique, et à partir des documents téléchargés par le M. le Maire et ses adjoints !

Après dix jours de préparation en atelier, le travail sur le mur a été réalisé en six semaines avec ma collaboratrice Anna Gorszinska, alors que quatre semaines avaient été initialement programmées : la nature du mur, composé de pierres en saillie a rendu le travail assez compliqué. Tant pour le report des poncifs (constitués de calques de 1m²) que pour la mise en peinture : les dessous des pierres saillantes devant eux aussi participer (en perspective !) au rendu visuel de l’ensemble. 

Tenir compte des volumes saillants du support…!

Nous avons appris que la gare de Nouvion, avant même la création de la SNCF, a été la plus grande gare de triage d’Europe, reliant les lignes d’Europe du Nord avec celles de l’Europe du Sud. La grosse vingtaine de lignes -hors celles de parking des rames- étant in fine connectées à la rotonde, bâtiment célèbre, qui accueillait les tractrices pour les redistribuer sur la ligne correspondant à leur future destination, par un système en étoile de portions de voies (supportant les tractrices) pivotant autour d’un axe central.

Maquette acceptée. Le bas du mur qui est visible depuis la grande place du marché, est occulté par une haie.
(Le blason n’a pas été retenu)

Sue la demande de la Mairie, la maquette doit illustrer principalement la valeur humaine de ce travail monumental de distribution de millions de tonnes de marchandises et d’animaux à travers toute l’Europe. Son point fort en est cette illustre photo de Jean Gabin œuvrant dans « La bête humaine », adaptation cinématographique de Jean Renoir du roman d’Émile Zola. En partie centrale haute, il a été choisi l’évocation de la rotonde -qui aujourd’hui n’existe plus- image « spectrale »  soutenue par un panorama des voies ferrées chargées de wagons (dont tous les types n’ont d’ailleurs pas pu être identifiés par les professionnels…) et ponctué par la présence harmonieusement distribuée d’agents SNCF, d’après une photo de 1909 (visiblement bien programmée par son auteur !), et alors éditée en carte postale . Comme pour la « BB¹», l’évocation de la tractrice à vapeur nous a été demandée avec insistance par la Mairie, puisque témoin de la naissance de l’ère industrielle. Nous avons rencontré, parmi les élus, d’anciens chauffeurs de telles locomotives qui nous ont aidés, à partir d’une photo de la locomotive à vapeur de moins de deux centimètres de longueur, pour sa représentation à l’échelle du mur soit … 75 cm de hauteur !

¹ : BB est le nom du premier modèle de tractrice électrique

Une fois la maquette établie à l’échelle, voici le premier élément du travail en atelier, qui est de préparer la trame pour rendre la maquette reproductible :

Chaque carreau représente ici un calque de 1mx1m qui sera créé en atelier par projection du dessin-au-trait de la maquette retenue, chaque calque est numéroté. Puis ce calque sera positionné sur le mur, lui-même partagé (au niveau, au fil à plomb et au cordeau, à partir de l’axe médian) en une trame de carreaux de 1mx1m, numérotés.

 

VOICI LES DIFFERENTES ETAPES DU TRAVAIL NECESSAIRE :

  • 1-Traçage en atelier des quatre-vingts et quelques calques (ou krafts),
  • 2- Perforation des linéaires repérés sur les claques (tendus sur des plaques de carton), avec une roulette à picots
  • 3- Mur : préparation du support par passage au jet haute pression et brossage vigoureux, puis application du primaire blanc, en deux couches
  • 4- Repérage et traçage par un « carroyage » du mur en mètre carrés
  • 5- Fixation des calques à leur adresse sur le mur, et passage de la poncette (poudre de pigment enfermée dans un tissu) par frottement ou tapotements sur les trous (on y arrivait parfois…à cause des décaissés dus aux pierre en saillie !) laissés par la roulette à picots
  • 6- Tracé au pinceau fin, ou au crayon, ou à la craie, du linéaire nécessaire à la mise en peinture….

État général du mur à l’ouverture du chantier :

Voici, pour exemple, les étapes du report de la photo de Jean Gabin : la deuxième photo (vers la droite dans la mosaÏque ci-dessous), représente la maquette du tracé (lignes rouges) et les carreaux auront chacun 0,5 m de côté ; sur le mur (un étage d’échafaudage fait deux mètres…) il va souvent falloir changer d’étage !

Quand on peint, il faut vraiment garder en permanence les yeux sur la maquette !
On ne sait pas toujours où l’on en est !!

Les documents de départ étaient des photos issues de photos de l’époque, il nous a fallu porter une attention particulière au traitement des personnages : certains habitants évoquant l’éventualité de reconnaître un membre de leur famille sur la carte postale originale ! Document certainement réalisé à partir d’un négatif grand format au vu du
« piqué » de l’image

Le travail sur l’échafaudage demande beaucoup de déplacements et d’auto-adaptations aux contingences : position des plateaux relatives à l’espace de travail, qualité du mur, lumière, raccords, recouvrements,…

Il a été choisi de traduire l’évocation du passé par la couleur bistre ou sépia qui sera la base des teintes choisies pour l’ensemble du travail.

Le Conseil municipal souhaitant offrir la surprise de la découverte de l’ensemble de l’œuvre à son public, il nous a été demandé de ne pas la découvrir avant le jour de l’inauguration. Nous ne pouvions donc évaluer la validité de teintes et des tonalités choisies que par tranches successives, dévoilant partiellement les travées concernées à des heures de moindre passage….

Le bas de la composition est « entièrement » recouvert par l’illustre « BB », première locomotive électrique, transition après le diesel avec lequel elle a cohabité sur les réseaux ferroviaires. Son immatriculation est une référence de modèle, qui est celui de l’exemplaire qui trône à l’entrée de la ville, sur une portion de voie de quelques mètres de longueur, face au bâtiment de l’ancienne gare, et qui abrite en particulier la Mairie d’aujourd’hui. Cette machine historique est ici volontairement représentée dans un style de figuration coloré et « non conforme », pour la remettre à l’honneur tant elle anime les souvenirs des habitants (tous en lien avec la SNCF, ce dont ils se targuent volontiers, comme nous avons pu régulièrement le constater …) qui l’évoquent avec une grande nostalgie !

Sur la photo ci-dessous vous évaluerez la complexité rencontrée par les peintres (nous…!) pour réaliser des tracés rectilignes !

Pris de vue en « camera subjective » : ça permet de percevoir la réalité du peintre !

Puis est arrivé le jour de l’inauguration qui nous a valu le plaisir d’expliquer à des écoliers et à beaucoup d’adultes aussi, les méthodes exposées ici, de reproduction d’un A4 au format d’un mur pignon, ce qui étonne toujours les passants stupéfaits par la contrainte de proximité du peintre avec son support, ce qui semble lui retirer toute possibilité de «recul» …

Une première photo sur laquelle nous encadrons le très aimable Maire, Monsieur Jean-Luc Claude, et la suivante sur laquelle l’adjoint aux travaux Monsieur Poirot si prévenant et attentif, nous accompagne avec Claudine, habitante de l’immeuble, qui a été si aimable et courtoise, curieuse et généreuse avec ses petits cadeaux encourageants (…en plats régionaux !).

Et ce fut la fin d’une très belle expérience qui nous aura permis d’apprécier l’hospitalité, la générosité et la spontanéité ardennaises, que j’avais tant appréciées lors de la réalisation d’un trompe-l’œil pour le bureau de Poste à Nouvion, petit chantier (voir l’article dans CLIENTS INSTITUTIONNELS en vignette ci-dessous) qui m’aura ainsi valu le plaisir de celui-ci !

« YESSSS »…… L’« ANGE QUI SOURIT » de la Cathédrale de Reims

2 réflexions sur “Nouvion-sur-Meuse

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